Plus ardent que le feu des volcans (Peter, Teddy & Elijah)

Est-ce que mes actions étaient considérées comme un flirt ? À le complimenter, prendre soin de lui, le qualifier de « Ken »… Selon certaines personnes ce serait flagrant. De mon côté, je me contentais de suivre mon intuition sans me poser de question sur le moindre de mes faits et gestes. Je voyais bien que cela perturbait Teddy qui peinait à trouver ses mots en réaction à ce qui lui arrivait. Heureusement, je ne percevais pas ça tel un « Qu’est-ce que tu me touches ? Dégage ! » muet. Il n’était pas habitué à ce style d’attention. J’en étais persuadé.

Ce rapprochement fut abrégé par l’entrée remarquée de Tyler Wood, un de mes étudiants en cinéma. À la tronche qu’il tirait, on aurait cru qu’il venait de se réveiller dans le manoir de la famille Adams. Choqué, gêné puissance 1000, il resta figé durant une poignée de secondes avant de sortir aussi rapidement qu’il avait déboulé. L’inconfort était partagé. Voir un de ceux que tu encadres te surprendre avec un autre de ses professeurs torse nu dans les toilettes d’un restaurant était comment dire… inapproprié. Le garçon allait passer la soirée à se faire toutes sortes de scénarios et, probablement, allait les partager avec ses camarades. Nous venions de nous tailler une sacrée réputation. Le retour du week-end s’annonçait épique.

Le musicien profita de ma distraction pour reboutonner sa chemise à lui tout seul. Pas que je ne l’aurai pas fait, mais j’étais tellement perplexe qu’il me fallait déjà redescendre sur Terre. Le plus tordu dans l’histoire -selon moi- venait du regard que les deux hommes s’étaient échangés. Bref, mais intense. J’ignorais si cela signifiait quelque chose en particulier ou si je me faisais des idées. De toute façon, je n’eus pas l’occasion de faire un commentaire de vive voix puisque je fus réveillé par l’alarme incendie.

Le musicien se fit arroser avant que nous ne nous extirpions de là à toute vitesse, sa main sur mon poignet. L’importance de l’incendie ne nous avait pas été dévoilée, mais impossible de retrouver nos deux collègues. Peut-être étaient-ils en train de rassurer des membres de la famille quelque part ? J’avais beau regardé, pas moyen d’apercevoir leur silhouette. J’ignorais quel comportement il me fallait adopter. Vu le nombre d’employés qu’ils étaient, je ne serais pas d’être d’un grand secours. J’allais encombrer plus qu’autre chose… Dans l’optique de compenser, je me promis de faire un don monétaire si besoin. Ils auraient besoin de soutien si les dégâts étaient sérieux.

Teddy me proposait de retourner chez lui pour y passer une commande. C’était sûrement l’unique scénario si nous voulions sauver cette soirée. Je hochais la tête. Ce serait avec plaisir. En espérant que cette dernière heure ne m’ait pas retourné l’estomac…

Je souris au père d’Ophelia et lui serrai la main. Ce fut presque un soulagement, que toute cette histoire de « qui est le petit-ami de la fille Wan » se termine. Et le père d’Ophelia était quelqu’un de sympathique, maintenant que je le rencontrais. Je l’avais déjà trouvé sympathique tout à l’heure, mais à ce moment j’étais aussi angoissé, donc. Je me demandai comment il fallait que j’interprète le regard déçu qu’il avait eu en regardant le siège de Teddy. Il l’aurait préféré lui ? Ou peut-être que c’était parce qu’il allait devoir nettoyer toute la banquette… Les Wan devaient certainement préférer les commandes à emporter quand il s’agissait de Teddy Scott.

Je me détendis, jusqu’à ce que Mamie Shang arrive et parle de mes futurs enfants. Pas que j’avais peur d’en avoir, mais elle était passée beaucoup trop vite de « Team Teddy » à « Faites moi des petits enfants », alors il fallait me comprendre, j’étais un peu chamboulé. Et comme je n’ai jamais pu m’empêcher de l’ouvrir, je lui répondis :

« C’est ça ! Enfin… A priori, oui. Enfin j'espère. Hum. » La petite voix dans ma tête qui me disait « tais-toi » n’était jamais assez rapide. Je maintins le regard de Mamie Shang, pas par bravoure, mais parce que je n’osais pas regarder Ophelia. On avait parlé de ça quelques fois, rapidement, par des sous-entendus, mais on n’avait pas eu LA conversation. Et c’était normal, on n’en était pas à un stade de la relation où on en parlait déjà. Je suppose. D’un autre côté, ma relation avec Ophelia n’était pas la plus ordinaire qui soit, et c’était plutôt génial d’ailleurs. Après tout, elle m’avait avoué ses sentiments en chantant le thème principal de Moulin Rouge.

Mamie Shang perdit son sourire soudainement, et je me demandai si j’avais dit quelque chose de mal. Puis je vis qu’elle fixait le criquet et me rendis compte qu’Ophelia avait parlé. La grand-mère partit et un silence de quelques secondes s’installa, si on peut dire qu’un silence s’installe quand il dure si peu de temps. Il fut vite interrompu lorsqu’Ophelia aperçut quelqu’un au loin et alla lui dire bonjour, et en regardant bien je remarquai qu’il s’agissait de Tyler Wood. Je la laissai y aller seule, et but le reste de mon verre. Ce pauvre Tyler, il avait l’air d’une biche apeurée au mileu d’un groupe de chasseurs. Peut-être avait-il peur des asiatiques ?

On entendit des cris dans la cuisine, et ne parlant pas chinois, aucun moyen de savoir s’ils se disputaient à cause du criquet ou à cause de moi. Je parierais plutôt sur le criquet. Soudain, l’alarme incendie se déclencha et toute la salle fut arrosée par les extincteurs à eau des plafonds. Je me ruai sur le sac d’Ophelia pour le protéger avec ma veste, parce qu’elle m’avait expliqué plusieurs fois que c’était une matière spéciale et que l’eau l’abimerait et… Mince, j’étais complètement conditionné. Je pris sa veste et m’approchai d’elle alors qu’elle revenait de sa rencontre avec Tyler Wood.

« Tu veux aider tes parents, ou on rentre ? »

C'était une soirée un peu trop agitée, et j'ignorais si le temps passait relativement vite ou non. Je ne préférais même pas le découvrir. Je vis alors Tyler Wood, un élève de Blackwell en train de passer commande au comptoir... Je l'interpellais alors.

« Wood ?! Tyler Woooood ? »

Mais le galopin fonça dans les toilettes... sûrement un pipi ou caca pressant. Teddy en avait souvent. Je fixais alors la porte des toilettes dans l'espoir de le voir repasser... mais l'attente se fit longue, alors je décidais de finir mon assiette, avant de le voir revenir. J'en profitais alors pour me lever afin d'aller lui parler un peu ! Sauf que le jeune homme avait prit sa commande et fila, pressé, vers la porte... Il m'ignora royalement avant de partir en courant. J'observais la scène, avant de tourner les yeux de gauche à droite, espérant que personne n'avait vu la scène, très gênante, qui venait de se dérouler. Je retournais m'assoir, cette fois-ci à la place initiale de Peter - pour éviter d'être tâchée par le siège de Teddy... - et je déposais un baiser sur sa joue.
Mamie Shang venait de quitter la table en me faisant un clin d'oeil. J'avais entendu ce qu'ils venaient de dire, mais je ne relevais pas, sachant que la soirée était assez... riche en n'importe quoi comme ça. Enfin, il y avait un temps pour tout, et visiblement j'avais mal choisi le moment pour présenter Peter à ma famille, et ils s'emballaient déjà un peu trop vite... Puis soudain, des cris retentirent dans les cuisines, et comprenant que visiblement le gaz avait été allumé et que quelqu'un avait oublié de l'éteindre et... bref, ils avaient enclenché l'alarme incendie, puis éteint le gaz. Mais visiblement, quelque chose avait explosé. L'eau se mit alors à mouiller tous les clients du restaurant, aussi je regardais Peter un instant.

« Je pense qu'il vaut mieux les laisser gérer la situation... Mon frère aussi sort du restaurant avec son ordinateur en plus, on devrait partir ! »

Je pris Peter par la main et l'emmenais à l'extérieur du restaurant, remarquant que nous étions déjà un peu trempés, puis je soupirais, en rejoignant le petit parking. Une fois arrivés, je me demandais où étaient passés Teddy et Elijah. Ils avaient du rentrer de leur côté, ou étaient encore à l'intérieur et allaient sortir...

« On peut aller chez toi ou chez moi si tu veux... Ou passer chez l'un de nous déposer notre voiture, puis aller chez l'autre et se mettre au sec. Puis surtout, au calme... »

Après approbation, nous partîmes finalement en direction de chez moi, vivant plus près d'ici, et je garais la voiture avant d'aller dans celle de Peter pour aller en direction de la ferme. Quelle soirée...

Incohérence: