Je faisais de mon mieux pour que ça se passe bien avec Alec, je le jure. Mais putain, j’aurais voulu qu’Eli ne m’abandonne pas avec lui. Je n’avais pas peur d’Alec. Je crois que je n’avais pas grand chose à craindre d’un gamin saoul. Cependant, j’avais peur de ce qu’il allait me dire. J’avais peur d’apprendre quelque chose concernant lui et Elijah qui me ferait remettre mes choix en question. Bordel, et moi qui pensait qu’on avait enfin trouvé un équilibre dans notre couple que rien ne pourrait bouleverser. Il faut que t’arrête de croire que tout est acquis mon pauvre Teddy. Ca fait que quelques mois que vous êtes ensemble, tu ne peux pas tout savoir.
Je râlais intérieurement contre ma propre naïveté, mais je n’en étais pas moins attentif aux réaction d’Alec. Je n’osais pas lui répondre autrement que par des sortes de grimaces expressives. Je crois que maintenant je comprenais mieux les réactions du jeune homme. Il n’avait pas forcément quelque chose contre ma personne. Il était jaloux. Il enviait ma relation, parce qu’il aurait aimé être à ma place. Merde, j’étais censé faire quoi ? Jamais personne n’avait été jaloux de moi. Ou tout du moins, pas à ce que je sache. Parce que, j’étais… Moi quoi. J’avais déjà du mal à croire qu’un gars comme Elijah puisse m’aimer pour ce que j’étais. Et maintenant son meilleur ami qui voudrait être à ma place. C’était, totalement surréaliste.
Je me demandai si Elijah était au courant des sentiments de son meilleur ami à son égard. Du peu que j’avais pu voir des deux, je crois que je pouvais répondre “non” à ma propre question sans trop me tromper. Il avait désigné Alec comme un frère et je doute qu’il se serait montré aussi entreprenant avec moi s’il était au courant. Pauvre Alec, je me sentais coupable de lui faire subir tout ça. Je savais que ce n’était pas de ma faute, je ne pouvais pas savoir avant. Mais quand même, j’aurais dû faire plus attention. Et… qu’est-ce qui me disait que j’avais raison ? Alec avait raison, je ne valais pas mieux que lui. Il connaissait Elijah depuis plus longtemps et donc mieux que moi. Il avait toujours été là pour lui. Elijah est même parti pour le protéger lui…
- Je sais pas je… Euh….
J’étais totalement perturbé. Incapable d’être sûr de quoique ce soit à présent. J’avais tellement envie de partir d’ici. Je ne me sentais plus du tout à ma place. Non, je ne devrais pas être ici. J’aurais dû rester chez moi et… Et un bruit attira mon attention à l’autre bout de la salle. Elijah était de retour. Il avait visiblement envie de faire un retour spectaculaire. Mais l’alcool ne l’aidait pas dans son entreprise, ce qui rendait la scène surtout ridicule. J’affichai un sourire amusé. Soulagé de le voir revenir aussi. Il agrippa Alec alors que ce dernier allait faire une réflexion apparemment. Et tout mes doutes me revinrent à l’esprit. Comme quoi, la simple présence d’Elijah n’était pas magique non plus. Elle n’était pas toujours capable de guérir tous les maux.
Je fus presque surpris de sentir le blond venir m’enlacer. Je ne savais plus comment réagir. Je forçais un sourire en posant une main sur un de ses bras. Allez, fait un effort Teddy.
- De quoi d’autre tu voudrais qu’on parle ?
Je disais ça presque en riant, alors que j’avais pas du tout envie de rire. Alec avait réussi à me retourner le cerveau en quelques paroles, c’était fou. Et Elijah qui agissait comme si de rien n’était. C’était presque rageant. Je crois que je pouvais presque comprendre ce que ressentais l’étudiant à présent. Mais bon, les deux étaient éméchés, il fallait que j’arrête de me prendre la tête, on en discutera quand ils seront sobre. Je me forçais à prendre une grand inspiration et soupirer pour me remettre les idées en place.
- Me porter ? Je suis pas sûr que tu sois en état Eli…
Je disais ça avec un sourire en coin. L’idée me déplaisait pas, mais j’avais un peu peur du résultat aussi. J’étais content qu’il propose qu’on rentre d’ailleurs. Mais on allait pas laisser Alec là. J’avais aucune idée ce que j’étais censé ressentir avec le jeune homme. Mais, en même temps, je n’étais pas un connard non plus, on ne pouvait pas le laisser tout seul dans un tel état.
- On te raccompagne Alec, t’habite où ?
Il n’avait pas le choix. Même si sa compagnie me perturbait et ne cessait de me tourmenter, il allait falloir que je prenne sur moi encore un peu plus longtemps. C’était le meilleur ami d’Elijah quand même, il tenait à lui, raison de plus pour ne pas le laisser là. Puis, je ne pouvais pas lui en vouloir pour ce qu’il m’avait dit. Enfin, j’étais bien placé pour savoir qu’on ne contrôle pas ce genre de sentiments. Même si du coup, je savais pas du tout quoi faire de cette information. Mais pour ce soir, restons concentré sur le fait de rentrer tous à la maison en un seul morceau, ok ?
Sam 12 Jan - 12:50
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Shadows settle on the place, that you left.
Lui aussi aurait préféré qu’Elijah ne l’abandonne pas, jamais. Mais ce soir, la vie s’amusait à le replonger dans cet événement sans fin. C’était injuste de sa part de contempler leur relation avec tant d’envie, et tant d’animosité. Mais Alec ne pouvait pas s’en empêcher. Il y serait sans doute mieux parvenu si l’alcool n’avait pas désinhibé sa langue traitresse. L’instant devait être pénible et frustrant pour le joli cœur d’Elijah. Teddy n’en laissait rien paraître jusque-là, se comportant comme le petit-ami parfait. Ce qui, naturellement, avait le don d’agacer Alec. Mais n’étant plus que deux, les mots pouvaient sortir. Son monologue intérieur brisait la cage de verre dans lequel il était enfermé et s’échappait par la porte de sortie. Ses lèvres bougeaient et l’inondaient de révélations aussi pitoyables que bouleversantes. Le grand brun ne faisait pas attention à Teddy, pas vraiment. Il avait remarqué sa présence, bien sûr, puisque c’était elle dont découlait toute cette hostilité. Mais sa réaction ne l’inquiétait pas. C’était comme si le temps avait ralenti à la minute même où Eli’ avait franchi le seuil de la porte des toilettes pour finalement se figer. Dans cette bulle, Alec avait l’impression qu’il pouvait laisser tonner ses mots, sans que personne ne vienne ensuite le lui reprocher. Bien sûr, c’était ignorer les quelques clients restants, le barman, et lui, Teddy. C’était aussi négliger les retombées de l’alcool, et le lendemain douloureux qui se pointait à l’aube. Sa bile acerbe déversée, Alec épiait le moindre mouvement de son verre d’eau – il semblait bouger. La voix timide de Teddy s’éleva à ses côtés. Ah ! bah tu vois, toi non plus ! Quelle ironie. Le grand brun aurait sans doute dû apercevoir l’ambiguïté dans sa voix. Dans son état normal, Alec l’aurait peut-être rassuré. Non, mieux encore, il ne l’aurait peut-être pas agressé. Il ne s’apprêtait pas à répondre quand Elijah fit une entrée tonitruante dans le bar, manquant de renverser une table sur son passage. Le beau blond s’approcha de la manière la plus grotesque qui soit et vint directement se saisir de ses joues, les pinçant comme une grand-mère l’aurait fait affectueusement en retrouvant son petit-fils. Yuk! Il ne voulait pas être son petit-fils ! Son petit-ami, à la rigueur. Mais petit-fils ? On entrait dans un tout autre niveau de dégoûtant, là.
« Tu fais mal, grand machin ! »
S’esclaffa-t-il, comme si l’instant précédant n’avait été qu’un rêve, et que la bulle venait d’éclater à son tour. Il n’y avait pas mort d’homme, puisque personne ne devait se souvenir de cet instant importun. Pas vrai ? Teddy avait peut-être raison. Il avait besoin de quelques verres d’eau fraiche, d’une bonne nuit de sommeil, et de six litres de café. En intraveineuse, de préférence. Teddy expliqua qu’ils parlaient bien de lui, le faisant douter. Se pouvait-il qu’il n’ait pas rêvé ce moment ? Gênant. Très gênant, s’en inquiéta-t-il, un sourcil levé. Nouveau hoquet et dégoût. S’il y avait bien quelqu’un qu’il ne voulait pas imaginer en infirmier – et encore moins en infirmière – c’était Teddy ! Les laissant faire leurs affaires et décider de leur fin de soirée, Alec demanda un autre verre d’eau au barman qui, étrangement, fut plus rapide que pour les shots. Lui déposant une trentaine de dollars sur le bar pour couvrir les frais, Alec engloutit quelques gorgées du liquide salvateur. C’est fade son truc…« Alec, tu… Tu veux faire quoi ? » Le jeune homme cherchait une réponse un peu plus convenable que celle qu’il avait en tête quand Teddy lui laissa comprendre qu’il n’avait pas d’autre choix que de les suivre. Non, c’est sûr, j’ai bien rêvé. Y a pas moyen qu’il ait entendu ce que j’ai dit tout à l’heure ! Alec était rassuré.
« J’loue un appartement dans le centre. J’vous suis alors… »
Il se leva et passa la porte le premier. Ce soir, il n’était rien d’autre que cela : une incohérence déambulant sans fin. Demain, le réveil allait faire mal. Très mal.
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