cigarette daydream • Tyler & Violet

Violet & Ty'

C'était devenu une habitude pour moi de rentrer de cours avec Violet. Bien souvent, nous y allions même ensemble. Je passais la prendre le matin dans mon vieux pick-up d'occasion et nous nous arrêtions prendre un café avant de filer à Blackwell. Cela ne m'avait jamais dérangé de la prendre avec moi, c'était même devenu pour ma part une routine plutôt sympathique.
En sortant de classe ce jour-là, je n'avais aucune envie de rentrer faire mes devoirs. Peut-être était-ce ce beau temps automnal qui me soupirait des envies d'aventures ? Je mourrais d'envie depuis quelques temps de partir à l'exploration d'Arcadia Bay, mais je n'en avais pas vraiment eu l'occasion jusqu'à présent. C'était le moment de saisir cette chance et, quitte à partir jouer les Indiana Jones, autant embarquer avec moi quelqu'un. Le choix était évident. Une fois dans ma voiture avec Violet, je verrouillais avec un sourire machiavélique les portières afin que la jeune femme ne puisse se défiler, puis tourna lentement la tête dans sa direction. « Ça te dit qu'on aille faire un tour ? » lui proposais-je tout en guettant sa réaction. Un simple sourire de sa part, et voilà que je mettais déjà le contact en route.

C'est ainsi que l'on parti en quête d'aventures et de trésors avant de finalement tomber sur la vieille décharge de la ville. Le dégoût qu'affichait Violet m'amusa, mais ce n'était malheureusement pour elle pas ça qui allait me freiner. Claquant la portière derrière moi, je faisais signe à mon amie de me suivre alors que je me dirigeais vers la grille à l'entrée. « Il y a une ouverture là ! » déclarais-je tout en pointant du doigt une brèche suffisamment grande pour que l'on puisse passer sans risquer de se blesser. Si Violet semblait hésitante au début, mon excitation enfantine fut contagieuse et eue raison d'elle.

« C'est un vrai cimetière de voiture ! » fis-je remarquer après que nous ayons un peu visité les alentours, bien que Violet avait elle aussi constatée la forte présence des vieilles carcasses métalliques. Un élément étrange attira mon attention sur le sol. Je me penchais pour ramasser un petit objet perdu parmi des débris de verres. « On dirait la balle d'un flingue ! » pensais-je au moment où Violet me fit signe de venir. Abandonnant ma trouvaille sur le sol, je la rejoignis dans une vieille Mustang où elle s'était déjà installée pour fumer. Tout en souriant, j'escaladais les corps sans vie des voitures afin d'arriver au siège conducteur sur lequel je pris place. « Il faut être idiot pour abandonner une telle merveille ! » lançais-je à ma partenaire tout en effleurant le volant. Pas besoin de s'y connaître en bagnole pour être éblouis par ce petit bijoux.
M'allumant à mon tour une cigarette, on resta un moment en silence à admirer la vue de ce nouveau royaume qui s'offrait à nous. « Un terrain de jeu qui peut vite devenir dangereux... » pensais-je en tirant sur ma clope tout en imaginant parfaitement une soirée se dérouler ici.

« Ça va toi en ce moment ? » finis-je par demander à mon acolyte tout en pivotant un peu ma tête vers elle afin d'étudier son visage. Il m'inspirait tellement de douceur et de beauté, si bien que je me demandais si j'aurais voulu aller plus loin avec elle si j'avais été du bon bord. La voiture tangua légèrement, mais rien d'alarmant.

Violet & Ty'

Acheter une vieille voiture et la retaper entièrement par moi-même était un de mes rêves. Mais je n'avais aucune connaissance en la matière et je savais par avance que je serai un mécano lamentable. Il était même plus que probable que je réussisse à faire exploser quelque chose en tripotant un peu n'importe quoi. « Tu peux toujours l'emmener chez un garagiste ! » proposais-je à une Violet dubitative, « Mais ça risque de te coûter bonbon ! ». Pourtant, je l'imaginais parfaitement à l'arrière de ce volant sur une route vide en roulant au-delà de la vitesse autorisée. Cette mustang dégageait quelque chose d'aussi sauvage et imprévisible qu'elle. « On pourrait être Bonnie et Clyde ! » suggérais-je en lâchant un petit rire extatique en nous imaginant conduire la voiture pour prendre la fuite en ayant l'impression de voler sans aller bien loin, la lumière de la liberté illuminant nos deux visages.

« Je savais que ça te plairait ! » lui lançais-je ensuite tout en terminant ma clope dont je jetais le mégot par-dessus bord. Les petites étoiles brillants dans les yeux de mon amie me fit sourire. C'était agréable de voir son regard se laisser aller à l'imagination plutôt qu'au chaos. Je savais qu'elle avait vécue des choses plutôt sombres, mais elle ne m'en avait jamais vraiment parlé et je n'avais jamais insisté, lui laissant le temps qu'il lui fallait pour m'en parler si elle avait besoin. « Non, je voulais juste savoir ! » répondis-je en ébauchant un nouveau sourire avant de moi-même répondre : « Quant à moi, ça peut également aller. Rien de très passionnant à raconter en ce moment... ». Lorsque l'on me demandait si j'allais bien, je n'aimais pas répondre un simple ça va, car cela ressemblait à mes yeux plus à une forme de politesse qu'autre chose. Avec un ça va, je ne savais pas si les gens allaient réellement bien ou si c'était au contraire la merde pour eux.

Lorsque la voiture tangua un peu trop dangereusement, je compris qu'il valait mieux que l'on sorte d'ici. « Je te propose que l'on descende ! » dis-je finalement à Violet sur un ton prudent et calme avant de la laisser sortir pour quitter à mon tour la voiture. Une fois en bas de ce tas de cadavres en ferraille, je laissais échapper un soupire de soulagement. « Plus de peur que de mal... » pensais-je en m'essuyant le front d'un revers de main. Au même moment, la mustang sur laquelle nous étions glissa en arrière et tomba brusquement à l'envers sur le sol. Le choc me fit sursauter malgré moi, car nous aurions pu être dedans et écrasé à cette heure-ci. « Je t'avais prévenu que nous aurions à jouer les Indiana Jones ! » fis-je à la jeune femme à côté de moi en ricanant nerveusement, essayant de reprendre la chose avec humour.

Malgré ce petit incident, j'étais bien déterminé à ce que l'on continue notre exploration. Faisant signe à Violet de me suivre, on se mit à quadriller les lieux autour du chemin de fer. « La voie est encore active d'après toi ? » demandais-je à Violet en haussant des épaules avant de remarquer une petite remise sur le côté, ressemblant plus à une cabane qu'autre chose. Je m'approchais alors de celle-ci et réalisa que la porte n'était pas déverrouillée. « On entre ? »

Violet & Ty'

Mickey Mouse. Cette souris me faisait bien plus flipper que rêver, mais la comparaison me fit rire. J'essayais tant bien que mal d'imiter la voix de celle-ci, mais la mienne étant trop grave, ce fut le fiasco totale. Le petit incident avec les voitures avait laissé de marbre Violet, qui ne sembla pas apprécier mon humour. Par chance, elle ne m'en tint par rigueur et on poursuivit notre exploration jusqu'à cette fameuse remise dont j'eus la brillante idée de vouloir visiter. Ma jeune amie ne semblait pas très confiante, il faut dire que je ne l'étais pas non plus, mais je cachais plutôt bien mon jeu. Bizarrement, la porte n'était même pas fermée et, après l'avoir tout simplement poussée, Violet passa la première et je la suivie en me demandant ce que nous allions bien pouvoir trouver.

L'intérieur était à la fois décevant et excitant. Je m'attendais presque à me retrouver dans le repère d'un serial killer, mais cela ressemblait plus à une sorte de bureau qu'autre chose. Un peu déçu, je me mis quand même à fouiller un peu les lieux. « Ça ne sent pas non plus la rose... » pensais-je en humant la vieille odeur de moisis mêlée à l'humidité. Je me demandais si nous étions les premiers depuis longtemps à venir en ces lieux, ou si cette remise était régulièrement visitée. A cette heure-ci de la journée, je ne m'attendais pas à ce que l'on croise quelqu'un, mais j'espérais qu'aucune présence chelou ne viennent nous déranger. Que ce soit Violet ou moi, aucun de nous deux ne voulaient d'ennuis.

En examinant un casier, Violet avait trouvé une étrange boîte en métal qui suscita aussitôt notre intérêt. Légèrement perplexe, la jeune femme c'était tourné vers moi pour me demander si on devait l'ouvrir. « Quelle question ! » pouffais-je en m'approchant, me saisissant de la fameuse boîte pour la secouer un peu, réfléchissant à ce qu'il pouvait bien y avoir dedans. Un trésor ? De la drogue ? Mon amie ne sembla pas très partante pour l'ouvrir. Je ne l'étais pas non plus spécialement, mais ma curiosité naturelle eut raison de moi. Posant la boîte devant moi sur le bureau, je l'ouvris prudemment afin d'instaurer un peu de suspens. « J'espère que ce n'est pas une bombe ! » plaisantais-je à voix haute avant de me rappeler que Violet ne risquait pas d'être très réceptive à ma blague. Me mordant légèrement la langue, j'ouvris le couvercle. « Des...magasine sur les chats ?! » m'écriais-je en découvrant une pile de revue sur nos petits amis à pattes, feuilletant au hasard l'un d'eux qui se prénommaient "Au bonheur des chatons" ou encore "Le Paradis de Mistigri".

A la fois ennuyé et dégoûté, je reposais nonchalamment le magasine dans sa cachette, n'arrivant même pas à en tirer une quelconque plaisanterie. « Bref. C'est nul. Cassons nous d'ici ! » lançais-je à ma coéquipière, sans me soucier de savoir si ma réaction puérile l'amuserait ou au contraire l'ennuierait. C'est alors que je crus entendre des bruits de pas et la porte grincer. Mon cœur fit un bond dans ma poitrine et mon sang ne fit qu'un tour. Figé, je tournais lentement des talons en direction de la sortie.

Violet & Ty'

Cette découverte avait été tellement décevante que je n'avais pas fait attention à certains détails, qu'heureusement Violet avait eue le bon sens de remarquer, dont notamment les dates de parutions des magasines qui étaient bien trop récentes pour qu'ils aient été enfermés dans la boîte en métal depuis une décennie. Cela ne signifiait donc qu'une seule chose : à défaut de vivre ici, quelqu'un venait régulièrement. Suffisamment en tout cas pour y avoir déposé les revues. « Je ne tiens pas à découvrir quel psychopathe vient se réfugier dans cette cabane pour lire des hebdomadaires sur les chats... » me dis-je en frissonnant avant d'être tiré de mes pensées par un cri qui venait de l'extérieur. La main de Violet vint se glisser dans la mienne, la jeune femme semblait paniquée. Je regrettais de l'avoir emmenée dans cette décharge, m'imaginant que cela aurait été un peu plus drôle. Mais cette excursion virait à l'angoisse, il fallait que l'on dégage d'ici. Je ne fis pas non plus le fier en entendant le bruit de chute s'enchaîner après le cri que nous avions précédemment entendu. Cependant, je faisais en sorte de garder le contrôle de moi-même, sinon je risquais de céder à la panique.

Après quelques minutes de silence, l'ombre derrière la porte avait disparue. C'était le moment où jamais de s'éclipser en toute discrétion, ou du moins essayer. Violet n'attendit pas réellement de réponse de ma part pour m'entraîner vers l'extérieur, après s'être assurée que la voie était libre. Sans rien dire, je la suivis hors de la cabane jusque dans les bois à côté du chemin de fer où on trouva refuge le temps de reprendre nos esprits. Je me plaquais alors contre un arbre et me laissa glisser le long de celui-ci tout en posant ma main sur ma poitrine pour vérifier que mon rythme cardiaque reprenne une allure normale. « En effet ! » répondis-je ensuite sans regarder mon amie avant de finalement tourner la tête dans sa direction et lâcher en souriant : « Je t'avoue, moi non plus... ». Lâchant un rire nerveux, je passais une main dans mes cheveux. A présent que j'étais calmé, je m'autorisais un regard vers la décharge afin de percevoir la moindre silhouette ou signe de ce qui avait bien pu se passer. Mais il fallait que je me rende à l'évidence. A moins de s'aventurer dans la décharge elle-même, on ne verrait rien depuis notre emplacement.

« Peut-être que c'est mieux ainsi ? » me demandais-je avant de jeter un regard à Violet. Culpabilisant de l'avoir entraîné la-dedans, même si concrètement il ne nous était rien arrivé -enfin, presque-. Je conclus qu'il valait mieux partir d'ici. « Je pense que l'on a eu suffisamment d'émotions pour aujourd'hui ! » lui dis-je finalement avant de me lever et m'essuyer les fesses comme si j'avais de la poussière dessus. « Je crois que l'on peut contourner la décharge pour revenir à la voiture ! » indiquais-je à la jeune femme avant de prendre les devants de la marche à travers le bois. Bien que j'avais déjà vu de nombreux reportages et lus d'innombrables articles sur des tueurs en série ou des meurtres dans des patelins paumés tel que Arcadia Bay, il était impensable pour moi qu'une telle chose puisse nous arriver dans la vraie vie. Tout comme l'épisode avec cette fille, que j'avais surpris avec Graziella se faire emmener d'une soirée par Nathan Prescott. Mon côté rationnel expliquait cet événement simplement : l'ombre sous la porte était simplement le gardien de la décharge et la personne qui avait crié était sans doute quelqu'un qui était venu déposer un objet dont il n'avait plus l'utilité et s'était blessé en le portant. Mais, comme lors de cette fameuse soirée, je sentais au fond de moi que quelque chose n'était pas normale, mais il était hors de question que je n'avoue le contraire.

On continua d'avancer en silence à travers les arbres. Violet derrière moi, je jetais régulièrement de petits coups d’œil afin de m'assurer qu'elle allait bien. On finit par arriver vers le coin où j'avais garé le pick-up et je fus aussi content de voir le véhicule que lorsque mon père me l'avait offert lors de mon arrivée en ville. J'espérais que notre départ n'attirerait pas l'attention, même si avec le vieux moteur que possédait mon bébé il était peu probable que nous passions inaperçus. Mais j'espérais au moins que nous serions loin au moment où les individus que nous avions laissés derrière nous ne réalise qu'ils n'étaient pas seuls.