Your brain get smarts but your head gets dumb
J’ai écrit une chanson pour chaque personne importante de ma vie. Il n’y en a pas beaucoup, mais, ouais, ça ressemble à peu près à ça :
Piste 01 - We’re Ravenous (Ken&Mel)
J’ai jamais eu faim. Et c’est surtout de ça que parle cette chanson en fait. Parce que j’ai été élevé par mes grands-parents, Kennedy et Melody Abolick. Grâce à eux, j’ai jamais eu faim. J’insiste sur le fait, mais ouais, j’ai jamais eu faim, ça a même plutôt été le contraire. Tu vois dans ta vie ? Quand tu vas chez mamie, pour un repas de famille et qu’elle te dis “oh mais t’as que la peau sur les os ! Reprend un peu de patates !” et elle t’en colle une assiette entière et tu sors pas de table avant d’avoir fini ? Imagine ça, mais tous les jours. Là, t’as mon enfance. Après, on est aussi des bonnes bouffe chez les Abolick, on peut pas trop le nier. La chanson parle de ça aussi.
Elle évoque aussi vaguement mes parents qui sont partis. Il y a une ligne qui dit : “Go far away, I won’t starve.”. Ils ne m’ont pas abandonné, hein ! Peut-être un peu remarques. Mais mes parents sont forains. Enfin ma mère à la base, puis elle est tombée amoureuse de mon père autour d’une partie de pêche au canards de tous les diables. Puis ils ne se sont plus lâchés. Mon père est parti avec elle. Et quand je suis né, ils m’ont laissé à papy et mamie. Parce que c’était plus simple au début que d’élever un enfant sur la route. C’est pas impossible, hein, mais ils se disaient que j’apprécierai la stabilité. Puis la ferme des grand-parents est le cadre idéal.
Je vais pas les contredire là-dessus. Je sais plus la phrase exacte mais à un moment, je parle de chèvre dans la chanson. Parce que Ken et Mel élèvent des chèvres, c’est leur activité principale. Pas pour les manger hein ! Mais pour le lait. Après, ils ont aussi quelques vaches, des poules, un poney, des champs de cultures. C’est une grande ferme ouais. J’ai très vite commencé à bosser là-bas. J’y bosserai sûrement toujours si mon amour de la musique avait surpassé celui que je porte aux chèvres. Mais elles sont toujours quelque part dans mon coeur, croyez-le bien. Bref, Ken et Mel, c’est les meilleurs parents du monde. C’est pour ça que je leur ai écrit cette chanson.
Piste 02 - The End of the World (Eddie)
Elle aurait mérité d’être la première, mais j’ai décidé de faire par ordre chronologique. Eddie c’est ma cousine. Ma partner in crime, ma meilleure amie et juste la meilleure tout simplement. Quand on est ensemble, c’est un peu une sorte d’apocalypse, d’où le titre de la chanson. Et puis ça a toujours été. Je sais pas comment expliquer, mais quand on était petits, Eddie venait passer ses vacances à la ferme. Ouais, elle restait tout l’été. C’était le meilleur moment de l’année. Certes, il y avait les autres cousins aussi, mais avec Eddie on a tout de suite eu un truc et on était tout le temps fourrés ensemble.
On avait inventé plein de jeux. Puis quand on était trop fatigués pour jouer, on avait de longues conversations sur la vie, sur ce qu’on imaginait pour l’avenir. La fin du monde revenait souvent. On s’est promis que peu importe ce qui arrive, on resterai ensemble. Puis on avait la musique aussi. Wah, le nombre de show qu’on a organisés pour le reste de la famille. En grandissant, c’était sûr qu’on deviendrait des superstars. Et vous savez quoi ? On s’est accroché à ça. Et on est devenus des superstars.
C’était des années incroyables. Après le lycée, nous avions tous les deux postulé pour rejoindre les bancs de l’académie Blackwell et vous savez quoi ? On a été acceptés. C’était pas gagné d’avance pour ma part, mais ils ont décidé de me laisser ma chance. Puis je crois que les grand-parents ont mis un beau cachet aussi. J’aurais pu m’accrocher à mes études, parce qu’à accepté à Blackwell, c’était pas rien pour un campagnard comme moi. Mais ce n’était pas rien non plus de se voir offrir un contrat par une maison de disques des plus incroyables : Funny Duck Records ! Évidemment que c’était du sérieux avec Eddie on a signé direct et on a lâché l’école. Parce que notre duo du feu allait devenir des superstars internationales, c’était sûr ! C’est ce qu’avait dit Mr. Lelouche !
Je sais, Teddy et Eddie, comme ça, ça ne vous dit rien. Mais si je vous parle des One Brain (to rule them all), ouais, ça vous secoue quelque chose hein ? Évidemment, qui n’a jamais entendu notre groupe ! Nous faisions des concerts partout dans l’Oregon ! On a même joué à un dîner des anciens combattants à Salem ! C’est pas rien ! Franchement, sans Eddie, je serais jamais allé aussi loin. Bien sûr qu’elle méritait sa chanson, elle aurait même mérité que je lui écrive tout un album, mais la flemme. Puis elle sait, elle et moi, c’est à la vie à la mort, cousins à jamais.
Piste 03 - My Corydalis (Cass)
Cassidy, c’est le dernier des Abolick. Je dis pas qu’il y en aura jamais d’autre après lui, mais c’est le plus jeune de la famille quoi. Le plus jeune des cousins et il restera toujours notre bébédi ! J’aurais pu appeler cette chanson “Bébédi” ou “Little bear”, mais je sais pas ce qu’il s’est passé ce jour-là. Mes deux neurones se sont enfin connectés et BIM ! My Corydalis, parce que Bébédi, c’est une fleur, une jolie fleur que j’ai vu éclore et que je vois continuer de rayonner avec les années. Cass est adorable, je le protègerai de ma vie si je n’étais pas aussi maladroit et risquerait plus de le blesser en essayant de le faire. Cette chanson, elle parle justement de ça. Enfin, de traverser la vie, de tomber, de se relever et de pas perdre espoir.
C’est un peu drôle parce que je l’ai écrite sans savoir ce que nous réserverai l’avenir. Je l’ai écrite pour bébédi, pour qu’il l’écoute et qu’il continue d’être notre petit rayon de soleil - un brin râleur, je vous l’accorde. Qu’il se laisse jamais abattre. A cette période, je pensais si mature et si invincible aussi je crois. Je pensais que je savais tout sur tout, qu’il n’y a rien qui pouvait nous arrêter. Quand j’ai écrit cette chanson, le label nous avait poussé à abandonner nos études avec Eddie pour partir en tournée. Ce qu’on a fait sans réfléchir. Et c’était génial, vraiment ! La vie sur la route, chanter, jouer, écrire, faire la fête, c’était top et toujours avec Eddie. Qu’est-ce qui aurait pu mal tourner ? Franchement, la vie était belle, elle valait la peine d’être vécue. Et je n’ai pas changé d’avis là-dessus à vrai dire. Vis ta vie à fond bébédi, profite, suis tes rêves et écoute pas ce que les autres veulent t’imposer.
Piste 04 - Mr. Not Well (Raymond)
Ouaiis… Celle-là, en fait, c’est une longue histoire. J’avais écrit une ébauche de cette chanson quand on était encore à Blackwell, pour me moquer du directeur (oui il était déjà directeur à cette époque, cet homme est immortel). Elle n’était pas géniale, c’était juste un truc stupide. Bon, comme beaucoup de mes chansons, mais celle-là elle était vraiment brouillon en plus. On a dû la chanter une fois sur scène à Arcadia Bay pour faire rire les étudiants de l’académie et c’est tout. Après elle a été enterrée dans les abysses, proche de l’oubli.
Je sais pas trop comment mais je suis retombé sur une vieille vidéo pourrie de ce fameux concert où on la jouait justement. C’était la période où ça devenait compliqué avec Funny Ducks records. Enfin pour tout vous avouer, avec Eddie, on l’avait pas vu venir. On a enregistré pas mal d'albums avant que le studio nous dise “il va falloir arrêter les gars”. Arrêter ? C’est-à-dire ? Eh bien, stop, plus rien. Finito. Et comme ça, du jour au lendemain notre carrière était finie. Plus d'enregistrements, plus de concerts, rien. Ca fait un vide je vous jure. Et surtout plus d’argent. Parce que le label avait coulé et comme on avait signé des contrats sans les lire bah… On avait le droit à rien, pas d’indemnisation, pas de cachet de départ, pas de droit d’auteur sur quoique ce soit, rien. Enfin, on est quand même reparti avec nos chansons.
Du coup, bah… Retour à la case départ. La nouvelle version de cette chanson en parle. De notre échec cuisant. De comment on peut être une rockstar un jour et un loser le lendemain. Alors non, on est pas si “Well” quand il faut retourner chez papy et mamie. Heureusement il y a toujours à manger sur la table qui nous attend et les chèvres pour nous tenir compagnie. Mais wah, le coup de blues quoi. Je crois que j’avais besoin d’écrire cette chanson. Et j’en écris plusieurs autre un peu triste pendant cette période. Heureusement, il y avait Ken, Mel, Eddie et les chèvres ! D’ailleurs c’est Eddie qui m’a poussé à quitter la ferme. C’est elle qui m’a motivé à retourner à la ville. Bon, pas non plus une ville énorme, mais à Arcadia Bay. On reprend du début ? Alors il fallait repasser par l’académie.
J’ai donc postulé pour le poste de régisseur, ouais, figurez-vous que pendant nos tournées, le label n’ayant pas trop de moyen, j’ai souvent servi de régisseur. Peut-être qu’on aurait pu voir là un signe du manque de sérieux de ce label… Parce que le peu de groupe qu’on était on était à la fois, musiciens, rockstar, régisseur, manager, agent d’entretien, les uns pour les autres, c’était un beau bordel. Mais bref, cette expérience m’aura permis de me faire recruter à l’académie. Maintenant, il n’y a plus qu’à attendre qu’un label nous repère à nouveau avec Eddie. Il n’y a pas de raison, nous sommes des rockstars, on sera à nouveau sous le feu des projecteurs ! Ce n’est qu’une question de temps !