Don't threaten me with a good time. feat. Brendon

Brendon avait peut-être raison. Peut-être qu’Elijah m’aimait encore, peut-être qu’il m’en voulait pour ce qu’il avait vu. Et la seule façon de régler le malentendu, serait d’aller lui expliquer. Mais j’en étais tellement incapable. Déjà, rien que le raconter à Brendon, qui était mon meilleur ami, avait été dur. Parce que le dire à voix haute était rendre la chose réelle, revivre les événements, alors que tout ce dont j’avais envie, c’était oublier cette histoire, passer à autre chose. Je me contentais de lui répondre pas un petit “hm”. J’avais hâte de changer de sujet.

J’avais l’impression de respirer à nouveau à parler d’autre chose que de ma situation actuel. J’étais content d’entendre et de constater que mon guitariste favori s’en sortait bien, qu’il avait trouvé sa voie. Je hochais la tête pour lui montrer que je comprenais. Quelque part, je soupçonnais Wells d’avoir un faible pour les esprits complexes et incompris. Plus de parlait avec mes collègues, plus j’avais l’impression que chaque personne qui composait le corps enseignant avait eu son lot de malheurs et que Blackwell était une nouvelle opportunité pour se ressaisir.

- J’ai pas de doute que tu t’en sorte bien et trouve ce dont tu as envie. Malgré ce qu’il affiche, Wells est quelqu’un de très ouvert, donc si un poste se libère, il n’aura pas de raison de te le refuser.

Sauf si ça ne correspondait pas à ses compétences. Evidemment que le directeur n’allait pas caser Brendon en temps que prof de chimie alors qu’il n’avait jamais étudié le sujet. Et si le guitariste se décidait à reprendre des études, il y aurait sûrement moyen pour qu’il s’arrange avec l’académie pour continuer d’y travailler en même temps. Je me mis à rire à l’imitation de Dobby. Brendon était terrible. Mais c’est pour ça que je l’adorais et pour une fois qu’une personne avait les mêmes références que moi, ça me rassurait grandement.

Et évidemment, à parler de ce qui nous lie, la conversation finit par dériver vers la musique. De grands projets qui se dessinaient déjà.

- C’est sûr que ça va prendre du temps, mais t’as raison, ça pourrait être génial. Pas de prise de tête, juste faire ça pour le plaisir et on verra ce qu’on en fait après ! C’est pas le principal. Sincèrement, si on peut faire des duo et des collab avec… je sais pas, d’autres artistes du coin ou même des élèves, ça pourrait être fun et bénéfique pour tout le monde.

J’avais étrangement retrouvé mon sourire. Sûrement parce que je renouais plus concrètement avec mon seul et vrai amour : la musique. Celle qui ne m’avait jamais trahi, tourné le dos, ni lâcher.

- Ouais, on se trouvera bien un nom cool ! Ils avaient qu’à être là au pire. Oh et James va bien ! Il s’occupe d’un autre groupe qui se lance plutôt bien en ce moment. Et en parallèle, il garde contact avec quelques artistes. Dont moi. J’ai fait quelques compo pour d’autre musicien à sa demande. Ca m’a permis de pas perdre tout contact avec l’industrie de la musique, tu vois.

Je crois que ce n’était pas à Brendon que j’allais devoir faire un cours sur la chose. Il était bien placé pour comprendre à quel point la rupture avait pu être rude. Et que jamais je ne pourrais rester loin de la musique. Même si son industrie était parfois impitoyable. Je ne pouvais pas m’en couper du jour au lendemain comme ça. Lui n’avait pas trop eu le choix avec sa cure, mais moi si, je l’avais ce choix justement. Et quitte à ne plus me produire sur scène, je pouvais continuer d’apporter ma pierre à l’édifice musical d’une autre façon.

- Mmh ouais, ce serait toujours un sacré boulot pour l’enregistrement et tout. Mais d’un autre côté, c’est sûr que ça pourrait être sacrément formateur. Je vais garder l’idée de côté, merci.

Après tout, je ne faisais que débuter dans le domaine de l’enseignement. Il fallait me laisser un peu de temps avant de trouver toutes les astuces pour réaliser ses projets. Mais malgré les problèmes que j’avais évoqué avant, ce n’était pas totalement irréalisable non plus. Après, je ne serais sûrement jamais fixé avant d’avoir testé.

- J’avoue que le théâtre ça t’irais bien. Après tout t’as toujours été le meilleur des OB pour faire le show.

Je disais ça en riant. Mais je le pensais vraiment. Ce n’était pas pour rien que Brendon avait été le membre le plus populaire du groupe. C’était souvent lui qui faisait le show sur scène, c’était lui qui menait la conversation dans les interviews. Et pour avoir fait mes années à Blackwell avec lui en cursus Art, il était bon en théâtre, je le savais. Il faisait de n’importe quelle scène son territoire.

Teddy avait sans doutes raison, Wells était sûrement quelqu'un de très ouvert. La preuve était que malgré ma réputation et l'information que le guitariste des One Brain de Arcadia Bay ait été en cure de désintoxication, il m'avait embauché. Bon, mon travail n'était pas foufou mais j'allais pouvoir entraîner l'équipe de natation et donner des cours pour apprendre à nager aux élèves, voire aux adultes également. Puis peut-être que si je faisais mes preuves, Wells me laisserait en effet avoir une promotion. Mais je ne savais pas exactement comment tout ça allait se dérouler. Je verrais bien à la rentrée. Puis nous divergeâmes sur la musique, la belle et douce mélodie du bonheur. Enfin... elle avait surtout accompagné mon échec cuisant dans ma vie, déjà pas très longue, qui aurait pu se terminer une bonne fois pour toutes lors de ce fameux concert. Lors de cette fameuse nuit.

- Je pense que tu as raison, on enregistre un morceau quand on en a envie, quand on a le temps... puis on pourra collaborer avec d'autres personnes oui, essayer de faire connaître un peu les gens pas forcément connus aussi, au moins à l'échelle de la ville. Puis faire des feat sympa ça pourrait aussi être cool, c'est une super idée, franchement !

Teddy souriait de nouveau, et le voir sourire me fit sourire à mon tour. C'était mon meilleur ami, je ne demandais qu'à le voir et le savoir heureux, et je savais que la musique nous réunissait et réunirait toujours. Je l'espérais vraiment en tous cas, mais Teddy ne m'avait jamais lâché, jamais abandonné. Il avait toujours été là, dans les meilleurs moments comme dans les pires. Teddy m'avoua alors que James et lui se voyaient toujours, et qu'il composait toujours, pour d'autres musiciens. J'étais ravi d'entendre ça, même si j'avouais être un peu déçu. C'était peut-être moi qui avait le plus à perdre dans le groupe. C'était moi qui avait merdé en faisant une overdose. Qui avait causé la séparation du groupe. Qui avait stoppé nos carrières musicales. S'il y avait bien une personne à qui on ne donnerait pas de seconde chance dans l'industrie, c'était moi.

- Je suis vraiment content pour James, et pour toi aussi. Ça me rassure de savoir que tu écris toujours aussi...

Je devais bien admettre que malgré tout, quelques personnes au cours de ma cure, dont un professionnel, m'avaient dit que lorsque l'on est connu et que l'on se casse la gueule monumentalement, on part avec un gros avantage, aussi. La perspective de se relever. C'était ça qui me faisait tenir le coup aussi, qui me faisait survivre durant ma cure, qui me faisait survivre durant l'été. Si je n'avais pas perdu ma bonne humeur et ma déconnade, j'avais pourtant gagné quelque chose que Teddy ignorait. Devais-je lui en parler ?

- Oui tu as raison, ce sera un peu une résurrection du groupe, en plus petit comité et sans les deux autres éléments principaux qui formaient les One Brain, mais... faut bien se renouveler aussi.

Puis je regardais autour de nous, dans le jardin, et repris.

- En tous cas on a le temps d'y réfléchir un peu, on a tout l'été pour préparer quelque chose si jamais. Ecrire une chanson, prévoir une instru et enregistrer le tout. Heureusement qu'on a un peu de temps avant la rentrée. Même si je t'avoue, j'ai vraiment hâte que l'été se termine... j'ai l'impression de mourir à petit feu depuis l'overdose.

Un sujet un peu plus sombre, mais j'avais besoin d'en parler aussi. Teddy ajouta que le théâtre m'irait sans doutes bien, et il me fit aussitôt sourire en rajoutant que j'avais toujours été doué pour faire le show. Je me mis à rire, baissant la tête, quelques souvenirs en tête.

- C'est gentil Dydy. Je crois que le théâtre ça me ferait vraiment du bien. Se cacher un peu derrière les projets donnés aux étudiants, les voir créer de nouvelles choses devant moi, avec moi ou grâce à mon aide, ça me ferait vraiment du bien. Mais bon... je verrais bien.

Puis je reçus un coup de téléphone, et en allumant ce-dernier, je vis qu'il s'agissait d'un de mes camarades de la cure. Je regardais Teddy, gêné, puis me relevais.

- Désolé, je dois vraiment prendre l'appel...

Puis je retournai dans la maison, cherchant à m'éloigner de tous mes colocataires en même temps, espérant ne croiser ni Charlie, ni Ophelia non plus. C'était Jimmy. Il avait rechuté.

A passer presque tout mon temps avec Elijah ces derniers mois, j’en avais presque oublié l’importance d’avoir des amis et de passer du temps ensemble. C’était assez terrible ça. Mais il fallait voir les résultats, à peine quelques heures avec Brendon, et je me sentais plus léger, presque revivre. Certes, l’ombre des événements récent était toujours présente. Mais au moins, mon meilleur ami avait réussi à me faire penser à autre chose, à l’avenir entre autre, en me motivant à travailler sur de nouveaux projets musicaux en sa compagnie.

- J’adore, c’est une idée géniale ! Pas de prise de tête et en plus on peut aider à promouvoir les autres, c’est top.

Je n’étais plus vraiment dans l’optique de remonter un groupe, enregistrer de nouveau album, puis faire des tournées. OB avait fait son temps. Ca n’avait pas beaucoup duré, mais ce n’était peut-être pas plus mal ainsi. J’adorai être sur scène, ne vous y trompez pas, c’était une hype unique que je serais incapable d’oublier. Cependant, j’aimais mon travail comme enseignant aussi. Au final, on peut dire que ce qui me passionnait le plus dans la musique, c’était de la partager et de voir les autres la partager autour d’eux à leur tour. Oui, je vous promet de postuler pour le rang du prochain Dalaï Lama.

Je me contentais de répondre à Brendon en hochant la tête. J’étais content aussi pour James et pour mes compositions. En même temps, je ne sais pas trop si j’aurais pu tenir si j’avais totalement stoppé toute production musicale soudainement. Certains tenaient des journaux intimes pour se vider la tête et bien moi, j’écrivais des chansons. Bien sûr, je n’allais pas vendre à un producteur des titres trop personnels, mais chacune de mes composition avait un petit bout de moi quelque part.

- Ouaiiis on a le temps et je te comprend, j’ai hâte que la rentrée arrive aussi. Rester à ne rien faire, c’est le pire. Ca nous fera du bien de retourner à Blackwell et d’avoir autre chose à penser que de ruminer de vieilles choses.

Si je n’avais jamais fait d’overdose, je crois que je pouvais comprendre ce que ressentait Brendon. Sûrement parce que ces derniers temps je les avais passé à broyer du noir et à me remettre en question. J’osais imaginer que c’était un peu pareil pour mon meilleur ami. Surtout qu’il n’avait plus le droit aux drogues pour apaiser son esprit.

- J’ai pas de doute là dessus. J’avais un peu peur en prenant ce job à Blackwell, mais au final…. Hm, nous vas-y t’inquiète.

J’allais me lancer dans un discours sur ce que cette année m’avait apporté, mais j’avais été interrompu par le téléphone de Brendon. A voir son air, c’était vraiment important, je n’allais pas râler. Je laissais juste mon meilleur ami répondre en s’éloignant pour ne pas que tout le monde assiste à sa conversation. En attendant, j’en profitais pour retourner faire un plongeon dans la piscine et j’allais sûrement passer le reste de l’après-midi à lézarder au soleil. De toute façon je n’avais pas vraiment mieux à faire. Quoique cette fois, je pouvais me réjouir et songer à nos projets qu’on venait d’évoquer avec Brendon, essayer de me projeter un peu et commencer à échafauder des plans pour parvenir à nos fins.