this ain't a song for the broken-hearted
Aîné de la fratrie Clarke, tu es né trois ans avant ton petit frère, Lucas, à Portland dans l'Oregon. Tu t'es souvent demandé comment auraient pu être les choses si tu avais eu plus de temps pour être un enfant unique, si tu avais eu plus de temps pour être un enfant tout court, insouciant, innocent, si tout aurait vraiment pu être différent.
Qu'on ne se fasse pas d'idées pour autant, tu l'aimes Lucas, tu l'aimes même trop pour ton propre bien mais être son frère n'a pas toujours été le rôle le plus facile à endosser au quotidien, d'un côté il y avait la pression, la pression que tes parents te mettaient, inconsciemment peut-être, celle d'être l'aîné parfait, l'exemple, l'idéal, le modèle alors même que tu n'étais toi aussi qu'un enfant qui découvrait, qui essayait, qui se trompait et de l'autre il y avait les disputes, entre lui et ton père, toujours violentes, toujours pesantes, oppressantes, du moins c'est comme ça que tu les vivais toi enfant. Tu as grandi comme ça alors avec cette peur viscérale de ne pas être assez, d'échouer dans un environnement ponctué par les cris et tu as fini par t'y perdre, ça ne se voyait pas, ça ne s'est jamais vu et ça ne se voit toujours pas, compensé par ton aisance sociale naturelle, par ta capacité incompréhensible à attirer les gens vers toi comme un aimant, charismatique, magnétique mais tu n'as jamais réussi à savoir où était vraiment ta place, à savoir qui tu étais ou ce que tu voulais.
Au lycée les choses étaient simples évidemment, dans cette micro-société qui n'obéit qu'à ses propres règles tu ne pouvais que briller, qu'être le roi, contrairement à Lucas tu as toujours fait partie de ces êtres populaires, toujours entourés de toute leur clique avec le monde à leurs pieds, qu'on admirait, qu'on voulait fréquentait, qui obtenaient tout ce qu'ils voulaient en claquant des doigts, capitaine de l'équipe de football qui flirt avec celle des cheerleader, un classique qui ne se démode pas mais le lycée ne dure qu'un temps et une fois terminé plus d'illusion derrière laquelle se cacher.
Tu aurais probablement pu partir à l'université après ça malgré un dossier moyen et ponctué de remarques sur ton comportement mais ce que proposait ton père, ses rêves de grandeur, médecin, politicien, avocat, ne t'intéressaient pas et ce que tu proposais toi n'avait eu pour seule réponse qu'un petit rire sec et un sourire moqueur. Tu n'étais pas Lucas toi, tu le craignais bien trop pour riposter, tu avais bien trop peur qu'avec toi, l'aîné, il se permette de dépasser les mots pour en venir aux gestes alors tu as simplement baissé la tête et gardé le silence en observant l'opportunité de faire des études s'envoler.
Tu as commencé à travailler au diner du coin alors, renouvelant ton contrat sans grande conviction et faute de mieux années après années, tu t'ennuyais à mourir dans cette vie, tout ce que tu espérais était un miracle, tout ce que tu attendais était le jour où tu aurais enfin assez d'argent pour pouvoir quitter Portland, pour pouvoir t'extraire de cet endroit qui te donnait l'impression d'être ton cercueil à ciel ouvert, pas encore mort mais déjà plus vraiment vivant
Finalement l'opportunité est venue de Lucas, tu as râlé pour la forme quand ce soir là tes parents t'ont demandé de l'accompagner faire ses études à Arcadia Bay, arguant qu'il n'était plus un bébé et qu'il n'avait pas besoin de toi mais secrètement tu étais ravi, en profitant même pour demander à nouveau la possibilité d'étudier les sciences, principalement la mécanique, requête acceptée, tu étais aux anges, persuadé que cette fois tout irait bien.
Tu te trompais.
Retourner en cours après toutes ces années, vivre en communauté...Tu as énormément de mal à le supporter, tu te sens constamment oppressé, presque claustrophobe dans cette ville bien trop petite, sur ce campus minuscule où tout le monde se connaît et ça n'a clairement pas arrangé ton comportement.
Tu as toujours été impulsif,ce n'est ni un scoop, ni un secret, tu as toujours été du genre à frapper d'abord, parler ensuite mais tout s'est aggravé depuis que tu es ici, tu es capable de frapper n'importe qui pour n'importe quelle raison, tu fumes trop, tu bois trop et même si tu te caches derrière la fameuse excuse du « c'est juste en soirée » ou « c'est pas grave, tout le monde le fait », au vu de tous les efforts que tu fournis pour cacher ça à Lucas, avec plus ou moins de succès, c'est bien que tu as conscience, quelque part au fond de toi, là où tu caches les vérités que tu ne veux pas affronter, que tu es sérieusement en train de merder.