this ain't a song for the broken-hearted
Les paillettes sur leurs joues brillent sous les lumières néons de la boîte et Dorothy se déhanche sur la musique, ses longs cheveux blonds se balançant en rythme. Elle adresse un sourire à Chul-Hei qui le lui rend au centuple. Dorothy admire les diamants qui brillent dans ses yeux et elle rit, fort, enivrée du cocktail au rhum qu’elle a pris en arrivant. À ses côtés, Sandra, Kimiko et Chul-Hei. Sa bande.
SA bande.
Même si Chul-Hei reste son préféré.
Dorothy vient d’une bonne famille. Certains vous diront même d’une
excellente famille, et il faut dire que de manière matérielle, Dorothy n’a jamais manqué de rien. Son père est PDG d’une boîte dans la finance et sa mère est médecin. Son grand-frère est pâtissier à Paris et Dorothy lui rend visite tous les étés.
Elle parle français et espagnol couramment.
Dorothy adore se servir de l’une ou de l’autre pour insulter les gens en leur adressant un sourire qui ne trahit rien de ses véritables émotions. Dorothy, du plus loin qu’elle se souvienne en tout cas, a toujours été comme ça. Elle a toujours su se faire aimer, même des gens qu’elle déteste. Si Dorothy croyait en ce genre de choses, elle dirait que c’est son super pouvoir.
Il faut dire aussi que Dorothy, dans ses vêtements de luxe et ses talons hauts fait partie de la haute, que ce soit à Arcadia Bay, ou simplement à l’Académie Blackwell. Sandra d’un côté et Kimiko, de l’autre, Dorothy foule la terre comme si celle-ci lui appartenait, et peut-être bien que c’est un peu le cas. Elle est une élève brillante, toujours au sommet, ses parents n’accepteraient pas moins. D’ailleurs entre les murs de la maison familiale, la formule est devenue comme un mantra secret :
Tu dois être digne de ton nom, ne nous fais pas honte.Il n’y a pas de prix pour la réussite et cela, Dorothy l’a vite compris quand, montrant des lacunes en mathématiques, ses parents ont fait appel au meilleur professeur particulier, tous les soirs, jusqu’à ce que ses notes remontent à la norme de la famille. Rien en dessous d’un A.
Dorothy ne peut pas accepter la médiocrité. Il faut qu’elle soit entourée des meilleurs, toujours, et c’est d’ailleurs comme ça qu’elle a choisi ses fréquentations. Sandra et Kimiko ont été une évidence, elles attendaient la même école, visaient la même excellence. Alors quand Dorothy est tombée amoureuse de Jack, Dorothy a su qu’il était destiné à de grandes choses. Il était plus vieux qu’elle de quelques années, tout juste sorti de Blackwell quand elle allait seulement y rentrer.
Jack était un artiste, le genre à ne pas vouloir se ranger, mais Dorothy l’a tout de même aimé, à sa manière. Disons que son potentiel lui plaisait. Dorothy voulait devenir photographe reconnue et les connections de Jack lui faisait de l’oeil. Leur arrangement les satisfaisait tous les deux, ou en tout cas, Dorothy le croyait. Elle qui avait toujours gardé le contrôle sur sa vie d’une poigne de fer, s’est trouvé désabusée quand elle a trouvé Jack en rencart avec un type que Dorothy avait vu dans certains de ses cours.
Un gars un peu réservé ou qui en tout cas, ne se mêlait pas trop à la foule. Et qui n’était de toute évidence pas au courant que Jack avait déjà quelqu’un. Dorothy ne pouvait pas laisser passer l’outrage et après avoir jeté son cocktail au visage de Jack, elle prit la main de l’inconnu pour l’emmener avec elle.
Elle aurait voulu lui faire la morale, et sans doute qu’elle aurait dû, mais il y avait des étincelles dans le regard du type. Du genre que Dorothy n’avait pas vu depuis longtemps.
De la passion.
Elle aurait pu le réduire en cendres, mais elle n’en fit rien. Chul-Hei, le nom du garçon. Il était avec Jack depuis plusieurs mois, persuadé d’avoir trouvé le grand amour et si Dorothy avait envie de rire à l’idée de Jack, grand amour, elle prit pitié et l’accueillit dans son groupe. Elle découvrit bientôt que Chul-Hei était de ces gens qui s’étaient retenus trop longtemps sous une éducation d’une main de fer. D’ailleurs Dorothy eu l’occasion de manger au restaurant de ses parents, plusieurs fois, redécouvrant des saveurs inattendues. Ils n’étaient pas riches comme ses parents à elle, loin de là même, mais ils avaient visiblement beaucoup d’affection pour leurs enfants, et plus de respect pour leurs rêves que les parents de Dorothy n’en avaient jamais eu. Elle prit l’option Danse pour suivre Chul-Hei. Elle recommença à traîner dans les clubs jusqu’à pas d’heures en sa compagnie, juste pour danser à en perdre le souffle et draguer des inconnus. Petit à petit, Dorothy reprit goût à la vie et si, sur le campus, on parle désormais d’elle et ses amis comme une bande de
popular mean girls, ça ne lui fait ni chaud ni froid.
Pour la première fois de sa vie, Dorothy se sent vivante.