Justin for life

J'observe longuement le plafond blanc qui semble tournoyer sans gêne autour de la lumière centrale. J'ai l'impression, d'ailleurs, que tout tourne autour de moi, à commencer par mon lit, une sorte de matelas deux places bien trop vide, posé sur un sommier en fer chelou pas des plus esthétiques. Suivi de ma table de chevet en fer que j'ose jamais bouger, ainsi que ma lampe d'appoint qui m'horripile tout autant. C'est moche, tout ça, quand on y pense. Tant de banalités dans un si petit espace. Et puis le saint graal, le libérateur de l'univers entier, trônant au centre d'un cendrier en pâte fimo. Le saint bédot. "Justin !" Mon regard se dresse vers la porte de ma chambre, entrebâillée, elle laisse apparaître la silhouette de ma mère, une panière de linge sale à bout de bras. "... ouais ?" Elle entre complètement. "C'est quoi ça ?" Je désigne du doigt le joint que je serre entre mes dents. "C'est un... attention roulement de tambours ! UN JOINT !" Elle ramasse avec énergie les vêtements qui jonchent le sol, pour enfin arriver jusqu'à moi. "Combien de fois il va falloir que je te le dise. Les joints, c'est après les devoirs !" Je souris, cela fait bien longtemps qu'elle a cessé d'essayer de m'arracher au canabis. Cause perdue, tel était le motif. "Mais m'man, ça enrichi l'imagination... Tu peux pas lutter contre la créativité d'un artiste, lui arracher sa muse, ce qui fait vibrer son palpitant, frémir son épiderme !" Elle tend la main. "Et ta connerie aussi ! Tu m'as saoulé Justin !" Je lui file un clin d'oeil "T.K.T bébé !" Elle soupire avant de claquer la porte. "Putain j'suis vraiment teubé."


J'ai toujours vécu à Arcadia Bay, et pour tout dire, je n'en suis jamais sorti. Non pas par manque de volonté, mais parce qu'ici, tout semble plus facile. Petite ville côtière plutôt tranquille, sans touristes arpentant les rues, je me sens bien. Je me sens chez moi, parce que ça l'est. Je n'ai jamais été quelqu'un de particulièrement ambitieux, préférant une vie en toute modestie, je me suis toujours débrouillé pour être bon, sans être le meilleur, par soucis d'anonymat. Je ne sais pas pourquoi, depuis la maternelle, je faisais exprès de cafouiller juste à la fin. Comme une signature. Ce n'est que lorsque j'eu atteins huit ans que je me décidai à faire vraiment quelque chose. Quand à mon anniversaire, on m'offrit mon premier synthétiseur. La musique, devint toute ma vie, ou presque. J'ai touché à tout, allant du piano jusqu'à la batterie, passant par le mélodica, et le saxophone. Un instrument de tout type, un instrument pour chaque épopée somptueuse de ma vie. Ou pas.

Quoiqu'il en soit, s'ensuivit l'amour pour le skateboard, ma rencontre avec l'épic mais unique Trevor, avec qui, je partageais et partage toujours une amitié plus ou moins inébranlable. Même âge, même passion, même goût pour les filles. Nous étions nés pour nous entendre, nés pour devenir bro', nés pour être faibles ensemble. On a traversé le lycée ensemble, comme si rien ne pouvait nous atteindre. Comme si le temps qui passait n'était pas des plus importants. Comme s'il n'y avait que nous, au dépend des autres. Vint ensuite l'amour, le petit, pas bien grand, facilement oubliable, et plus ou moins négociable, mais qui durait. Il durait même beaucoup. Quelques années, une et demi. Une, si on compte le fait que depuis quelques temps, mes pensées se détournent pour flancher du côté d'une brune aux allures de femmes. Trevor le sait. Et il sait que je sais qu'il sait. Lui aussi il sait, il sait que je sais que lui aussi elle occupe ses pensées. Néanmoins, nous n'en parlons que très peu. Parce que j'ai une copine. Et que... pour un soucis d'étique, je ne me permet pas de parler de Dana.

Bref... j'ai une vie d'attardé dont tout le monde s'en bat incroyablement le steack..